Le changement climatique impacte l’ensemble de l’écosystème mondial et il a des conséquences sur le système financier.
Pour cette raison, la Commission européenne considère désormais le risque climatique comme risque « systémique ». Ce dernier peut être à l’origine de crises financières majeures.
Le régulateur, en tant qu’autorité de contrôle prudentiel et de résolution, s’est penché sur ce phénomène pour s’assurer que le système financier peut résister, à tout moment, aux chocs dont l’origine est attribuée au changement climatique.
La gestion des risques générés par le climat nécessite des outils et des méthodes faisant appel à des indicateurs d’analyse extra-financière. La difficulté majeure à laquelle les acteurs économiques sont confrontés est le manque de précision liée à la disponibilité des informations, la maîtrise des mécanismes de propagation des chocs climatiques et ses impacts sur les actifs.
De même, différents scénarios utilisés ne sont pas encore consolidés pour manque de données de qualité et fiables.
Face à la multitude des outils, des approches et de variétés de perception, il fallait un cadre réglementaire, qui organise ce domaine. D’où l’émergence de la réglementation en risque climatique.
Les normes permettent d’orienter, guider, cadrer et rendre cohérents les pratiques et les efforts nationaux, européens et mondiaux dans l’intérêt commun de toutes les parties prenantes.
La réglementation prudentielle vise à fournir aux différents acteurs concernés des règles et des lignes directrices permettant plus de transparence en ce qui concerne la publication d’informations sur les risques de changement climatique et leur prise en compte au niveau des hautes instances de gouvernance.
Le cadre réglementaire a commencé à voir le jour depuis plusieurs années. Mais, l’Accord de Paris de 2015 sur le climat a apporté une incitation remarquable pour des travaux de normalisation. Bien que le pilier « environnement » et les risques climatiques guident les différents travaux de réglementation, l’intérêt s’est étendu aux risques sociaux et de gouvernance (approche ESG).
L'analyse réglementaire des normes les plus marquantes et significatives pour la gestion et la maitrise du risque climatique permet de mettre en évidence leurs cadres, apports et limites, ainsi que les projets de réglementation en cours d’élaboration.
Le développement durable : la taxonomie européenne, la loi française de transition énergétique et son fameux article 173-VI, la norme ISO 14064 sur l’empreinte carbone
La biodiversité : les lois de protection de la biodiversité
Les lois climat (France, Europe, Monde)
La finance : les projets réglementaires en cours (stress-test, test de résistance.)
Pour se préparer à la neutralité carbone mondiale, en mars 2018, l’Union Européenne a annoncé un plan stratégique ambitieux pour une économie plus durable dont les objectifs sont :
Réduction des émissions de GES d’au moins 55%, comparée aux niveaux de 1990
Atteinte de 32% de part d’énergies renouvelables
Réalisation de 32,5% d’économie d’énergie par rapport à la consommation habituelle de l’Union européenne.
Le projet d’élaboration d’une taxonomie européenne, initié par la Commission européenne en 2018, s’inscrit dans le cadre de ce plan climat européen.
Ce plan est décliné en 10 actions stratégiques :
La banque de France pilote le groupe NGFS, constitué des banques centrales et des superviseurs pour le verdissement du système financier.
Cette initiative a été prise par la banque de France avec 7 autres banques centrales. La création de ce réseau d’acteurs a été annoncée par le gouverneur de la banque de France, Monsieur François Villeroy de Galhau, en avril 2019 :
« Dans le but de généraliser la finance verte, le monde financier ne peut se substituer aux décideurs politiques, mais il peut aider. Et, la banque de France, en tant que banque centrale et superviseur, est déterminée à apporter son aide. C’est pourquoi en décembre 2017, à l’occasion du One Planet Summit, nous avons lancé le réseau des banques centrales et des superviseurs pour le verdissement du système financier, NGFS . »
L’objectif de ce réseau est de coordonner tous les efforts dans ce domaine, partager les meilleures expériences et pratiques et mobiliser les parties prenantes afin de soutenir une transition vers des modèles économiques bas-carbone.
Parmi les recommandations faites par le réseau NGFS : favoriser le développement d’une taxonomie européenne des activités économiques.
Ce groupe participe activement aux travaux d’élaboration de cette taxonomie. Il s’agit de se munir d’un outil officiel commun de notation des activités, mesurant leur niveau de conformité à un développement durable. Cet outil doit permettre dès 2022 plus de transparence, la comparabilité et la lutte contre le ‘greenwashing’ dans l’univers bancaire et financier.
Parmi les recommandations faites par le réseau NGFS : favoriser le développement d’une taxonomie européenne des activités économiques.
Ce groupe participe activement aux travaux d’élaboration de cette taxonomie. Il s’agit de se munir d’un outil officiel commun de notation des activités, mesurant leur niveau de conformité à un développement durable.
La Commission européenne a fixé 6 objectifs à prendre en compte et à incorporer dans cet cet outil de taxonomie :
(1) Atténuation du changement climatique
(2) Adaptation au changement climatique
(3) Utilisation durable et protection des ressources hydrologiques et marines
(4) Transition vers une économie circulaire
(5) Prévention et contrôle de la pollution
(6) Protection et restauration de la biodiversité et des écosystèmes.
Une activité économique est alignée avec la taxonomie lorsqu’elle répond aux quatre conditions suivantes :
Contribuer substantiellement à un ou plusieurs de ces objectifs environnementaux
Ne pas causer de préjudice significatif aux autres objectifs sur l’ensemble du cycle de vie des produits et services de l’activité
Respecter les normes minimales en matière sociale et de gouvernance (droits humains, droit du Travail, etc.)
Être conforme aux critères d’examen techniques établis dans les actes délégués , qui permettent de mesurer la contribution aux objectifs ou le degré de nuisance (seuils, pratiques utilisées, normes à respecter, etc.).
Cet outil devait permettre dès 2022 plus de transparence, la comparabilité et la lutte contre le ‘greenwashing’ dans l’univers bancaire et financier.
En 2023, les six objectifs environnementaux prioritaires, listés ci-dessous,
Bien que cette taxonomie apporte des réponses à des questions fondamentales, liées au développement durable, elle est d’ores et déjà critiquée pour plusieurs raisons.
Tous les secteurs ne sont pas couverts et les critères techniques sont encore à développer pour quatre objectifs environnementaux sur les six fixés par la Commission européenne.
En plus, elle est trop binaire et ne valorise pas les efforts faits par une entreprise, prenant des mesures afin d’atteindre le seuil de contribution substantielle.
De même, cette taxonomie ne prend pas en compte les difficultés liées à la disponibilité des données.
Enfin, cet outil ne sera pas figé car lorsque les critères auront tous été établis, le seuil de contribution substantielle sera régulièrement revu afin d’atteindre un objectif zéro émission de GES d’ici 2050.
Article 173 relatif au reporting réglementaire
La loi sur la transition énergétique pour une croissance verte a été adoptée en août 2015.
Les efforts communs menés par l’administration française et les acteurs du secteur privé ont abouti à cette innovation réglementaire pionnière, favorisant la transparence d’informations sur les impacts des activités et investissements sur le climat et l’environnement.
Dans son article 173, le décret associé à cette loi a mis en place des dispositions nécessaires pour permettre aux acteurs concernés de démontrer la conformité de leurs activités aux obligations de transparence, ou d’y déroger en expliquant les difficultés rencontrées et les actions à mettre en place pour s’améliorer.
Selon l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), depuis 2017, les rapports publiés dans le cadre du reporting réglementaire, dicté par l’article 173, couvrent l’essentiel du marché. Mais, le bilan des entreprises de petites tailles reste contrasté.
Cette loi a permis de lancer des travaux de réflexion sur les meilleures modalités de prise en compte du risque climatique et son intégration dans la stratégie de gouvernance et de gestion des risques.
A travers les rapports annuels publiés et dédiés au développement durable, des expertises sont valorisées par les entreprises et appréciées par le régulateur.
Ce dernier veille à l’application des dispositions de l’article 173. La mobilisation de ressources, dédiées à la gestion des risques liés au changement climatique, est palpable chez les acteurs de la place à travers leurs publications et reporting réglementaire (banque, assurance, gestionnaires de fonds.)
Bien que l’article 173 ne prévoit aucune obligation explicite concernant les décisions d’investissement, il vise à renforcer le rôle des investisseurs dans le financement du développement durable et inciter les différentes parties prenantes à une meilleure intégration des critères ESG dans les processus d’investissement.
La loi sur la transition énergétique est ainsi venue amorcer le développement de méthodologies internes d’analyse et d’intégration effective du risque climatique dans les dispositifs de gestion des risques
Loi « climat et résilience » de 2021
Dans le cadre des efforts nationaux et internationaux, la France se positionne comme pays pionnier dans la lutte contre le changement climatique.
Elle porte plusieurs initiatives et projets de réglementation dans ce domaine. La « Convention citoyenne pour le climat » a lancé un projet de loi visant à accélérer la lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses risques.
Cette loi intitulée « Loi climat et résilience » a été adoptée définitivement le 20 juillet 2021 par le parlement français. Elle vise à rendre l’écologie une priorité de société.
Le décret n° 2021-663 sur l'article 29 de la Loi climat et résilience a, ainsi, été publié dans le journal officiel de la République française le 28 mai 2021. Ce décret précise les informations à fournir par les acteurs de marchés financiers sur les modalités de prise en compte, dans leur politique d'investissement, des indicateurs et critères environnementaux, sociaux et de gouvernance. Le pilier « Environnement », y compris la biodiversité, se trouve consolidé de point de vue réglementaire.
Ce décret définit la liste des indicateurs à prendre en compte dans les prochaines publications (rapport annuel de développement durable) exigées par la loi de transition énergétique pour une croissance verte de 2015 et son article 173-VI. Il s’adresse aux entreprises d’assurance, banques, sociétés de gestion de portefeuilles, établissements de crédit, collectivités, etc.
Les acteurs concernés doivent intégrer des indicateurs dans leurs rapports de publication annuels à partir de 2022 sur l’exercice 2021. Parmi ces indicateurs :
Les moyens mis en œuvre pour contribuer à la transition énergétique et écologique
Les ressources, de toutes natures, dédiées à la prise en compte des critères ESG dans la stratégie d’investissement
La part des encours sous gestion prenant en compte des critères ESG
La part des encours dans des entreprises utilisant de l’énergie et ressources fossiles
Un objectif quantitatif à horizon 2030, à revoir tous les 5 ans jusqu’à 2050, sur l'alignement des portefeuilles à une trajectoire 2°C, conformément aux principes de l’Accord de Paris et les engagements de la Commission européenne. Le même objectif concerne la protection de la biodiversité dans le respect des conventions internationales
Les modalités de prise en compte des risques ESG dans la stratégie de gouvernance et les processus de gestion des risques.
Cette loi s’inscrit dans une volonté d’inciter davantage les acteurs économiques à plus d’engagement dans la stratégie nationale et internationale de lutte contre le réchauffement climatique et la réorientation des flux financiers vers une économie bas-carbone.
L’article 173 de la loi de transition énergétique de 2015, non explicitement obligatoire, se trouve renforcé par la loi climat et résilience de 2021.
Cette dernière exige notamment une analyse quantitative, selon des indicateurs précis et transparents, de la contribution à la protection de la biodiversité.
Dans leur futur reporting réglementaire, les acteurs doivent mesurer leur niveau de respect des objectifs internationaux liés à la biodiversité.
Limites de la normes ISO 14064 relative à l'empreinte carbone
Dans le cadre des efforts internationaux de lutte contre le dérèglement climatique et l’objectif de l’humanité visant à limiter le réchauffement du globe, l’organisation internationale de normalisation a mis en place un référentiel et élaboré des outils de mesure de l’empreinte carbone, des protocoles de validation et de vérification du bilan carbone.
Ces outils sont reconnus mondialement.
Une famille de normes ISO 14060 a, ainsi, été développée.
La norme ISO 14064 (2018) fournit un standard de référence pour le diagnostic, la quantification, la déclaration, les suppressions des gaz à effet de serre, GES.
Nous rappelons ci-dessous la série de la norme générique ISO 14064-x et nous renvoyons le lecteur au site internet « www.iso.org » pour plus de détails sur les autres séries.
L’ISO 14064-1 met à la disposition des organismes des principes et des lignes directrices pour la conception et le développement de procédures d’inventaire de GES
L’ISO 14064-2 détaille les principes et les exigences permettant de déterminer des références et de surveiller, quantifier et déclarer les émissions d’un projet. Elle se focalise sur des projets GES ou des activités basées sur un projet, spécifiquement conçus pour réduire les émissions de GES et/ou pour améliorer les suppressions de GES. Elle sert de base pour la vérification et la validation des projets GES
L’ISO 14064-3 détaille les exigences relatives à la vérification des déclarations de GES, liées aux inventaires de GES, des projets GES et de l’empreinte carbone des produits. Elle décrit le processus de vérification ou de validation, notamment la planification de la vérification ou de la validation, les procédures d’évaluation et l’appréciation des déclarations de GES d’un organisme, d’un projet ou d’un produit.
Les principes et les règles de la norme ISO 14064 sont similaires au système « GHG Protocol » ou l’outil « Bilan Carbone ».
Rappelons que l’objectif mondial est d’atteindre une neutralité climatique mondiale à horizon 2050 dans une hypothèse de réchauffement limité à 1,5°C.
Cet objectif passe par la mesure et la réduction de l’empreinte carbone pour chaque entité ou activité.
La comptabilité carbone, selon cette norme ISO, a des limites. La variation réelle d’émissions induite par une entité peut être en écart par rapport aux émissions quantifiées par l’entité, en appliquant les dispositions de cette norme ISO.
En fait, quand on mesure l’empreinte carbone liée à un produit ou un service, on ne prend pas en compte son utilité. Cette dernière pourrait jouer un rôle en faveur de la réduction d’émission de GES, par exemple. Donc, ce qu’on mesure peut-être au final erroné.
De plus, un produit de substitution commercialisé par une entreprise remplace un autre produit. Donc, au final, le bilan de GES émis par l’activité de production peut être négatif ou positif.
Un produit de substitution innovant, plus performant et respectant l’environnement, peut générer moins d’émission de GES que le produit remplacé et, dans ce cas, le bilan carbone se trouve amélioré.
Une activité peut conduire à un bilan global d’émission CO2 réduit (écart entre les émissions et les réductions générées)
Les activités de restauration, de sauvegarde ou de renforcement de la capacité d’absorption des puits de carbone naturels (forêts, sols, mers et océans) en sont des exemples.
Aussi, une activité utilisant des méthodes faisant appels à des technologies d’émissions négatives peut aussi donner un bilan carbone allant dans le sens de la neutralité.
Les méthodes de mesure du bilan carbone sont indépendantes de la valeur ajoutée de l’activité.
Par exemple, les émissions générées par un même produit tout au long de son cycle de vie ne sont pas réparties par entreprise utilisatrice. Des entreprises intervenant sur ce même produit (au niveau des maillons de la chaine de valeur) comptabilisent séparément le même volume d’émissions. Donc, au final, le bilan carbone se trouve comptabilisé autant de fois que le nombre d’intervenants sur ce produit.
Il convient de rappeler qu’une entreprise peut appartenir à un secteur fortement émetteur de GES, mais, en même temps, elle peut contribuer à la réduction de l’intensité énergétique ou à la lutte effective contre le réchauffement climatique.
En conclusion, comme le GHG Protocol, la norme ISO 14064 (2018) fait la distinction entre les émissions directes et indirectes. Cependant, elle ne définit pas les champs d'application.
La mesure du bilan carbone d’une entité ou activité n’aboutit pas forcément au vrai volume d’émissions GES généré. Cette mesure peut ne pas refléter la juste contribution de l’entreprise à la variation d’émissions mondiales induite.
Ces standards largement adoptés par les différentes parties prenantes devraient continuer à susciter des interrogations sur la fiabilité d’une mesure d’émissions basée sur une approche d’empreinte carbone.
Stratégies & Risques d'entreprise
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Séminaires & publication
Les banques, les compagnies d’assurance, les entreprises, les collectivités territoriales sont tous concernés par le changement climatique et ses impacts.
La conception de stratégies d’entreprise dans ce domaine doit prendre en compte des facteurs liés au développement durable et à l’investissement socialement responsable.
La stratégie prise par une entreprise s’appuie, entre autre, sur les fonctions risques. Ces dernières mettent à disposition des analyses, des scénarios, des simulations, des données consolidées sur les incertitudes du futur.
Tous ces éléments sont essentiels pour la prise de décision et la planification stratégique. La pérennité de l’entreprise se trouve renforcée avec la prise en compte des risques.
Les banques, les compagnies d’assurance, les entreprises, les collectivités territoriales sont tous concernés par le changement climatique et ses impacts.
La conception de stratégies d’entreprise dans ce domaine doit prendre en compte des facteurs liés au développement durable et à l’investissement socialement responsable.
La stratégie prise par une entreprise s’appuie, entre autre, sur les fonctions risques. Ces dernières mettent à disposition des analyses, des scénarios, des simulations, des données consolidées sur les incertitudes du futur.
Tous ces éléments sont essentiels pour la prise de décision et la planification stratégique. La pérennité de l’entreprise se trouve renforcée avec la prise en compte des risques.
Les banques, les compagnies d’assurance, les entreprises, les collectivités territoriales sont tous concernés par le changement climatique et ses impacts.
La conception de stratégies d’entreprise dans ce domaine doit prendre en compte des facteurs liés au développement durable et à l’investissement socialement responsable.
La stratégie prise par une entreprise s’appuie, entre autre, sur les fonctions risques. Ces dernières mettent à disposition des analyses, des scénarios, des simulations, des données consolidées sur les incertitudes du futur.
Tous ces éléments sont essentiels pour la prise de décision et la planification stratégique. La pérennité de l’entreprise se trouve renforcée avec la prise en compte des risques.